La toile au sol, le corps en mouvement, les gestes amples, je jette la peinture sur la surface de la toile (qui bien souvent n’est plus vierge, déjà marquée d’autres histoires), j’étale au racloir, au chiffon, je ne pense pas l’oeuvre avant de la faire, je la pense en la faisant jusqu’à ce que une image émerge dans mon cerveau et se projette sur la toile comme sur un écran.

Alternance des couches de peintures et des couches d’imaginaire. Ainsi par transparence on peut deviner l’en-dessous, l’empilement des idées sur la toile, une troisième dimension.

Le résultat est quelquefois très sobre lorsque l’idée est venue vite et quelquefois complexe, dense lorsque les rêves s’enchevêtrent. Je joue avec les textures de la peinture avec la fluidité, ça coule, ça s’étale, ou avec la pâte opaque en épaisseur qui accroche, se ride prend du relief et garde la trace du geste.

Un espace se crée de façon aléatoire au départ puis peu à peu je le modèle, je le construis, lui donne de la profondeur, de la lumière et de l’ombre. Les couleurs (le plus souvent des bleus, des noirs, des blancs) semblent parfois proches ou lointaines, jouant avec les différents plans de la perspective atmosphérique.

J’essaye que la peinture vive laissant la place à l’instinct du geste, à quelque chose qui déborde de moi et qui me dépasse puis je reviens à la réalité pour construire l’espace, c’est cet aller-retour entre l’imaginaire et la réalité qui permet de donner du sens au tableau.

A la fin quelque chose est dit et chacun peut y trouver sa résonance.